Comment le numérique a changé le tourisme
Le marché du tourisme a été révolutionné par le digital et ses plateformes commerciales. Elles se considèrent comme des apporteurs d’affaires et des promoteurs des destinations et non des distributeurs: elles exigent des commissions élevées (20 à 25%). Elles justifient ce prélèvement par le référencement pour gagner la «bataille du clic»; le coût du référencement est un goulot d’étranglement qui se situe davantage au niveau de Google qu’au niveau des géants de la réservation en ligne.
Blogs, sites, news letters… de nombreux acteurs ont trouvé des raisons de s’insérer dans la chaîne de valeur: contenu éditorial, comparaison de prix, opinion et forums, «bons plans», groupes communautaires pour le marketing d’influence…
La chaîne de valeur du tourisme numérique se caractérise par deux extrêmes, très concurrentiels avec la multiplication du nombre d’acteurs, et au centre une forte concentration avec l’apparition de géants mondiaux de l’intermédiation.
Au Maroc, la prise de conscience est manifeste mais quand on part avec du retard, c’est toujours plus compliqué car le défi est d’éviter un positionnement de perpétuel rattrapage.
1- Redéfinir le rôle et les missions des organismes institutionnels? Doit-on considérer qu’ils n’ont pas la culture marchande pour s’occuper de la commercialisation et qu’ils doivent se concentrer sur les contenus qui doivent être adaptés aux exigences?
2- Faire évoluer le rapport de force avec les plateformes: il est possible de ne pas rester passif et sur la défensive en jouant la coagulation d’une véritable force de frappe collective. Le rôle de l’Etat trouve à ce niveau toute son expression.
3- Faire valoir les compétences marocaines remarquables qui existent en mettant à profit précisément la créativité d’internet.
C’est pour dire que la clé de voûte pour réussir la transformation digitale repose sur les Ressources humaines là où elles se trouvent! Le choix d’innover dans une société changeante, le choix de créer une société capable d’apprendre sont incontournables! Il n’y a pas de doctorat en digital, il n’y a que le désir et l’ambition d’être en phase avec ce siècle de l’accélération.
Qui joue, qui gagne aujourd’hui?
Côté demande, il s’agit d’une prise de pouvoir par le consommateur. Il est devenu acteur, ou «consomm’acteur» producteur d’informations et d’opinions; le pouvoir a changé de main. Or quand quelqu’un a le pouvoir il en abuse, disait Montesquieu. Donc le consommateur est devenu exigeant, intransigeant, c’est un enfant gâté ou un despote consommateur; ce qui souligne l’importance de la compréhension de l’opinion, de sa construction à son influence. Un enjeu où tout est devenu communication!
La construction de l’opinion est un vrai défi car la parole ne descend plus du chef à ses troupes, elle remonte de l’individu à l’ensemble de sa communauté; cela implique de cibler le message et son destinataire.
Côté offre, la transformation de la chaîne de valeur est un nouveau modèle de distribution.
Les nouveaux maîtres de la commercialisation, les On line Travel Agency (OTA: Booking , Expedia , Tripadvisor…) ont modifié la chaîne de valeur, disqualifiant nombre d’agents traditionnels. Les nouveaux entrants centralisent l’offre créant des oligopoles de cette offre. Seuls les grands groupes comme Accor Hotels ont tenté de créer leur propre market place pour contrer les OTA.
Les rapports de force ont changé. La valeur ajoutée se retrouve désormais en aval de la chaîne de distribution, au niveau des acteurs capables d’accompagner le client de bout en bout avec une grande souplesse d’exécution.
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Le présent article est un extrait remanié de la conférence donnée par la Pr. Lahrichi devant le CDS-CGEM en avril dernier: L’Economiste des 12, 13 et 16 avril 2018