Femmes: Le coût élevé de l’inaction
Si les inégalités sont un obstacle à la croissance, leur coût est encore plus élevé lorsqu’il s’agit de l’inégalité hommes/femmes. Le potentiel des femmes est une ressource inexploitée pour la promotion d’une forte croissance. Une étude de l’OCDE montre que ces discriminations coûtent 575 milliards de dollars pour 6 des pays de la région MENA, Algérie, Egypte, Jordanie, Libye, Maroc et Tunisie. La réintégration des femmes donnerait 0,6 point de PIB supplémentaire.
En effet, leur niveau d’études a progressé dans tous les cycles de l’enseignement, ce qui contraste avec leur faible participation à l’activité économique. Les difficultés des femmes à s’engager dans l’activité économique concernent également l’entrepreneuriat.
Au Maroc, les hommes créent deux fois plus d’entreprises que les femmes et comme elles sont moins présentes sur le marché du travail, elles ont moins de possibilités d’acquérir des expériences, de développer leurs compétences et de détecter les créneaux porteurs.
La création des richesses reposait et repose encore sur le capital matériel, le travail et l’innovation. Avec la révolution numérique, premier champ d’opportunités, une place plus grande revient à l’intelligence et l’innovation: internet sollicite le potentiel créatif et réduit ainsi les barrières à l’entrée pour une nouvelle race d’investisseurs. L’entrepreneuriat des jeunes d’une façon générale et féminin en particulier souffre de difficultés financières.
En matière d’écarts de chômage entre hommes/femmes, le Maroc est un peu moins mauvais que l’Algérie, l’Arabie saoudite ou l’Inde, mais l’inégalité marocaine devant le travail est plus forte que la plupart des pays subsahariens, où la moitié des PME sont dirigées par des femmes (mais moins d’1/50 aura accès à un financement). Le Maroc est à 48,9% d’écarts entre les femmes et les hommes vis-à-vis du chômage. L’Algérie et l’Inde sont à 54%, et l’Arabie saoudite détient le record mondial d’éviction des femmes à 59%. L’Europe du Sud tourne autour de 10%. Rappelons que la population active compte les hommes et les femmes en âge de travailler et qui manifestent l’intention de travailler.
Il peut ainsi être conforté mais cela ne dispense pas d’une politique volontariste pour stimuler la nouvelle économie. Chacun de nous observe depuis son ordinateur ou son Smartphone la marée d’innovations dont les applications touchent l’ensemble des activités humaines. La bonne nouvelle concerne les gains de productivité que peut produire la mise en relation directe de l’offre et de la demande. Combien de brevets ont été déposés au Maroc?
Le second champ d’opportunité concerne le changement climatique. Les femmes sont vulnérables surtout en milieu rural. Cependant l’accent doit être mis sur leurs ressources pour faire face au changement climatique car elles occupent une position privilégiée pour en juguler les effets néfastes grâce à leur savoir-faire ancestral, leurs capacités créatives, innovatrices et coopératives; elles ne doivent pas être perçues comme des victimes mais comme porteuses de solutions.
Cependant, il ne s’agit pas seulement de prendre en compte les besoins pratiques des femmes comme l’accès à l’eau par exemple, mais surtout leurs besoins stratégiques comme l’accès à la propriété foncière et la participation à la prise de décision à tous les niveaux publics et privés. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture a montré que si les femmes avaient le même accès que les hommes aux ressources productives, elles augmenteraient leur production agricole de 20 à 30% et permettraient de nourrir 150 millions de personnes supplémentaires. Un coût de l’inaction à méditer!
Les réformes institutionnelles pour renforcer le statut des femmes sont nécessaires mais pas suffisantes pour investir le champ économique; des lois spécifiques et des stratégies dédiées et résolues sont indispensables.
Seulement 12% de postes de responsabilité!
Au Maroc, 26,7% sont en activité contre 51% en Indonésie et 64% en Chine.
Les femmes qui travaillent ont un niveau de formation supérieur à celui de leurs homologues masculins et cela n’empêche pas les disparités dans l’accès aux postes de direction.
La part moyenne des postes à responsabilité détenus par les femmes est de 12,8%, privés et publics confondus. Pourtant ce vivier croissant des femmes instruites et désireuses de travailler est une chance absolue pour relever le défi de la croissance et de la compétitivité à l’instar des pays qui ont émergé.
Le taux de chômage des jeunes femmes est supérieur à celui des jeunes hommes même si elles sont moins nombreuses sur le marché du travail et plus instruites (voir carte). Le taux de chômage moyen des femmes ayant fait des études supérieures dépasse 25% alors que celui des femmes sans diplôme n’est que de 5%! Les femmes sont plus souvent que les hommes dans l’emploi informel peu ou pas rémunéré et précaire.