La Relance Industrielle, Vue par le Commerce Extérieur
Article publié dans l’Economiste du 9 avril 2014 suite à la présentation, à S M le ROI Mohammed VI, du plan d’accélération du développement industriel
Dans quelle mesure la stratégie industrielle aura-t-elle un impact sur le déficit commercial ?
La nouvelle stratégie met l’accent sur une des causes profondes du déficit commercial soit la fragilité de l’appareil industriel qui ne produit pas assez d’entrants pour d’autres industries et d’autres secteurs ; le contenu de nos exportations en produits importés est élevé , les importations de biens intermédiaires représentent la moitié de nos importations soit près de 200 milliards de Dhs , le déficit commercial résulte plus de la progression soutenue des importations que des faibles performances des exportations dont le rythme d’évolution est plus soutenu ; (la dépendance des importations par rapport aux exportations est un phénomène mondial mais chaque pays cherche à maximiser la valeur ajoutée produite sur son territoire ,dalleurs les statistiques du commerce international commencent à être tenues en valeur ajoutée pour apprécier le positionnement des pays dans les chaines mondiales de production)
C’est dans la mesure où le diagnostic pour réduire le déficit met plus le curseur sur la maitrise des importations pour produire que sur l’augmentation de l’offre exportable qu’on peut dire que la stratégie industrielle lui apporte une réponse structurelle ;
En quoi est- elle structurelle ?
Elle est orientée de façon à ce que les industries soient articulées entre elles et puissent répondre également aux demandes des autres secteurs en s’appuyant sur deux clés de succès , l’intégration du tissus productif pour créer de la valeur ajoutée locale et le transfert de technologies pour dépasser le stade de la sous traitance , d’autant plus que le coût de la main d’œuvre ne constitue plus notre avantage compétitif ; le PNEI a lancé de nouveaux secteurs prometteurs , la nouvelle stratégie projette d’en faire des industries intégrées avec une montée en valeur dans les filières industrielles ; il en est de même pour les secteurs dits traditionnels comme le textile , une démarche à l’instar des pays émergents qui sont dans une phase de rattrapage technologique ; pour arriver à ce stade , la stratégie s’inscrit dans la logique des écosystèmes qui consistent à favoriser l’émergence de grandes entreprises nationales et étrangères qui feront appel à des PME pour leur fournir biens et services en mettant l’accent sur l’innovation et la qualité ; le renforcement des dispositifs de soutien aux PME concerne l’ accès au foncier locatif, au financement , à la formation , aux marchés et à l’administration à travers le guichet unique ; l’ensemble de ces éléments va contribuer à créer de nouvelles locomotives exportatrices avec plus de produits, plus de valeur ajoutée plus de marchés notamment en créant le reflexe Afrique chez la PME ;
Qu’en est-il des accords de libre-échange ?
c’est ce saut qualitatif qui va permettre d’en tirer profit ; cette montée en puissance de l’industrie permettra de réussir l’ouverture économique par l’intégration de notre économie au marché international plus par les exportations que par les importations qui nécessitent par ailleurs plus de régulation ; il s’agit aussi de protéger l’industrie nationale contre toute concurrence déloyale , de diagnostiquer en permanence le protectionnisme déguisé et les obstacles non tarifaires et pour les futurs accords réaliser des études d’impact avant les négociations ; c’est à ce niveau que les missions du CNCE trouvent leur expression ; le conseil s’inscrit dans une démarche d’intelligence économique autour de trois volets : traiter l’information pour l’aide à la décision , assurer la sécurité économique des entreprises et renforcer l’influence de notre pays .
Quelles implications de la lutte contre l’informel ?
la lutte contre l’informel, qui concurrence notre secteur industriel dont plusieurs usines ont fermé , traduit une vision large et approfondie de la stratégie industrielle et ce, par la reprise d’un secteur industriel structuré et par la reconquête de notre marché intérieur à condition, bien entendu, de produire dans des conditions de prix et de qualité compétitives ; en outre le marché intérieur est intégré à la stratégie industrielle en prenant en considération la dimension régionale à travers le couple territoire industrie, la compétitivité est également une question d’organisation économique .la conquête du marché intérieur facilite celle des marchés extérieurs, le prisme de l’intégration locale ne peut être efficace que si nos produits sont de qualité et compétitifs quel que soit leur destination, marché domestique ou exportation, car on est dans une économie ouverte : la compétitivité interne et externe sont les deux facettes d’une même médaille et permettent à la croissance économique de marcher sur ses deux pieds
En définitive, le commerce extérieur est une résultante, ce n’est pas le commerce qui crée la croissance mais l’inverse : c’est la création d’entreprises industrielles produisant des biens et des services échangeables, devenus de plus en plus complémentaires et interdépendants, qui créent la croissance ; aucun pays ne s’est développé sans une base productive, sans un secteur industriel articulé aux demandes des autres secteurs
« Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer »
http://www.leconomist.ecom/article/933181-la-relance-industrielle-vue-par-le-commerce-exterieurpar-la-pr-nezha-lahrichi